Les milices vaudoises

L'histoire

Dans la langue sacrée et littéraire de l’Inde, le mot MIL qui constitue le radical du mot milice signifie “réunir” ou “rassembler”. A l’origine, il s’agissait de s’unir pour la défense d’intérêts vitaux. Au temps des Romains, les milices sont déjà bien connues et les Anciens en parlent souvent. Sous différentes formes, elles ont évolué en Europe, mais dans le Pays de Vaud elles ont acquis une structure originale bien distincte des autres pays.

La particularité, c’est peut-être d’avoir servi un pays qui n’a jamais été indépendant. A la période de la Maison de Savoie a succédé le régime de Leurs Excellences de Berne, puis la République Helvétique et enfin la Confédération Suisse. Mais ce qui prédomine au cours des temps est cette volonté d’entretenir un esprit de défense, se traduisant par une discipline consentie dans l’intérêt de tous. Au-delà des suzerainetés, des dominations et des tutelles plus ou moins pesantes des comtes de Savoie à la Confédération du XXème siècle, les Vaudois avec leur prodigieux pouvoir d’assimilation se sont toujours sentis citoyens de la même patrie. Dans cette prise de conscience d’appartenir à une même nation, quels qu’aient été les ensembles plus grands auxquels celle-ci était rattachée, les Milices Vaudoises ont certainement joué un rôle fédérateur important. Dès le XIVème siècle, les Vaudois ont fait du service militaire ensemble dans des corps de troupe vaudois. On peut imaginer sans peine les relations ainsi créées au travers du pays, renforcées par le sentiment de défendre et parfois de servir au loin le même coin de terre.

Lors de la période savoyarde, les Milices Vaudoises étaient réputées pour leur cohésion morale au combat, leur qualité de fantassin dans les sièges, leur détermination dans l’action et leur non-conformisme lorsqu’il s’agit de la défense du Pays.

La conquête du Pays de Vaud permet au canton de Berne de bénéficier du savoir militaire vaudois. Plus de deux siècles et demi durant, les Milices du Pays de Vaud vont servir sous la bannière de l’Ours. Leur effectif a compté au début du XVIIIème siècle jusqu’à 21’000 hommes, répartis en sept régiments d’infanterie et treize compagnies de chasseurs, ce qui représentait le tiers des troupes bernoises.

Après la période troublée de la République helvétique et de l’occupation française, la création du canton de Vaud en 1803 ouvre une nouvelle période, la période faste des Milices Vaudoises qui débouche sur la constitution, en 1874, de l’armée fédérale dans sa forme définitive. L’organisation militaire héritée des Bernois n’est pas d’emblée abolie. Les régiments font place dès 1799 aux légions helvétiques et, dès 1803, aux bataillons numérotés d’après l’arrondissement où ils étaient recrutés. Le territoire cantonal est à cette époque divisé tant pour le recrutement que pour l’instruction en huit arrondissements militaires, soit Vevey, Aigle, Lausanne, Nyon, Orbe, Yverdon, Morges et Payerne. De 1803 à 1852, les Vaudois effectuent leur service militaire à domicile. Leur instruction est confiée aux 8 commandants d’arrondissement qui sont placés sous la haute surveillance d’un inspecteur en chef des Milices résidant à Lausanne. Le pacte fédéral de 1815 jette les bases d’une armée fédérale, même si les cantons conservent toute latitude dans la conduite de leurs affaires militaires.

Il leur suffit de tenir à disposition de l’armée fédérale le contingent qu’ils doivent fournir en cas de guerre. La création de camps fédéraux d’exercice met en évidence le besoin d’unifier l’instruction des troupes qui est bien différente d’un canton à l’autre. La participation des troupes vaudoises à différentes campagnes – guerre du Sonderbund, affaire de Neuchâtel, guerre franco-allemande de 1870 – apporte la preuve de l’insuffisance de la milice cantonale et d’une inévitable centralisation de l’armée fédérale. C’est tout le sens de la révision de la Constitution fédérale de 1874. Dès cet instant, l’histoire des Milices Vaudoises se confond avec celle de l’armée fédérale.

Avant-revue à Beaulieu en 1850